Lorsqu’on exploite une entreprise, une décision importante à prendre est de déterminer si vous allez embaucher un employé/salarié ou retenir les services d’un travailleur autonome.
Un travailleur peut être considéré comme un salarié ou comme un travailleur autonome. Les critères permettant de déterminer ce statut seront expliqués dans cet article.
Pourquoi est-ce important de déterminer le bon statut? Parce que les obligations légales et fiscales envers un travailleur autonome et un employé sont très différentes.
Contrat de travail VS Contrat de sous-traitance
Si vous décidez d’embaucher un salarié, vous lui ferez signer un contrat de travail. Si vous décidez plutôt de retenir les services d’un travailleur autonome, vous lui ferez signer un contrat de sous-traitance (ou ce dernier vous soumettra son contrat de service). La différence principale entre ces deux contrats est le lien de subordination. Ce lien est obligatoire dans le cas du contrat de travail.
Il est primordial de bien les distinguer puisque la qualification du contrat signé avec cette personne peut engendrer plusieurs conséquences, par exemple concernant les lois applicables en cas de résiliation du contrat.
Effectivement, les lois en droit du travail, qui s’appliquent dans le cas d’un contrat de travail, sont beaucoup plus restrictives qu’en cas de contrat de sous-traitance. On applique alors les dispositions du Code civil du Québec qui laisse beaucoup plus de liberté aux cocontractants que la Loi sur les normes du travail.
La qualification du statut est importante puisqu’un contrat de sous-traitance pourrait être requalifié en contrat de travail s’il est jugé que le contrat dissimule un emploi salarié! Ainsi, le contrat écrit entre vous et le travailleur ne suffit pas afin de déterminer le statut du travailleur, mais il sera certainement analysé dans l’évaluation du statut. Il est donc recommandé de confier la rédaction de ce contrat à votre avocate!
Employé déguisé
Le statut d’employé comparé à celui de travailleur autonome n’est pas uniquement une question de choix : même si vous décidez de faire affaire avec un travailleur indépendant, ce dernier pourrait, par la suite, demander à être considéré comme un employé. Il pourrait obtenir ce statut s’il démontrait que, dans les faits, son statut correspond davantage à celui d’un employé.
Effectivement, ce n’est pas parce qu’une personne se déclare travailleuse autonome qu’elle en est nécessairement une. Pour déterminer si une personne travaille comme salarié ou comme travailleur autonome, les tribunaux ont énuméré plusieurs critères.
Un travailleur autonome est plutôt, dans les faits, un employé si :
vous lui fournissez ses outils de travail;
il doit personnellement fournir les services demandés;
il ne peut se faire remplacer;
sa présence au travail est contrôlée;
il agit exclusivement pour votre entreprise;
vous lui imposez un certain rendement;
vous fixez son horaire, son lieu de travail et ses méthodes de travail;
vous pouvez prendre des mesures disciplinaires contre lui;
il ne court aucun risque financier;
vous payez ses frais de formation et de perfectionnement.
À l’opposé, un véritable travailleur autonome :
est libre de décider des moyens d’exécution des services que vous lui confiez;
contrôle son travail;
fournis ses propres outils de travail;
peut réaliser des profits et des pertes;
peut déléguer les services que vous lui confiez à d’autres membres de son organisation;
agis pour d’autres clients/entreprises;
est son propre patron;
est libre d’accepter ou de refuser un mandat;
paye ses propres dépenses d’exploitation (frais de déplacement, repas, etc.).
Le travailleur autonome, parfois désigné comme « entrepreneur indépendant » ou « prestataire de services », est donc une personne qui travaille pour elle-même, et non pour le compte d’une autre personne (alors qu’un salarié travaille pour une entreprise).
Le critère déterminant reste le lien de subordination. Ainsi, même si un travailleur autonome a seulement un client (vous), ce seul critère n’est pas suffisant pour conclure qu’il est un employé. L’important, c’est que ce travailleur autonome conserve le contrôle sur la réalisation des services que vous lui demandez, tout en examinant l’ensemble des critères énumérés ci-haut.
L’importance de déterminer le bon statut
Un travailleur peut se considérer comme un travailleur autonome, ou être considéré comme tel par vous, tout en étant considéré comme un salarié selon les différentes instances administratives et gouvernementales : les autorités fiscales (Revenu Québec et l’Agence du Revenu du Canada), la CNESST, etc.
Ainsi, lors d’une vérification par les autorités, une évaluation de la situation des travailleurs pourrait les amener à conclure qu’un travailleur autonome a plutôt le statut de salarié. En pareil cas, vous serez donc tenu de payer les cotisations qui auraient dû être versées, et ce, depuis la date où il a commencé à travailler pour vous.
Effectivement, le fait de donner de l’ouvrage à un travailleur autonome ne vous impose presque aucune obligation : pas de cotisation au RRQ, RQAP, CNESST, ni à l’assurance-emploi. Vous ne lui donnez aucun congé ni aucune vacance payée, aucun fonds de pension ni d’avantages sociaux. À l’inverse, lorsque vous embauchez un salarié, vous devez acquitter toutes les charges sociales et obligations qui en découlent.
Par conséquent, l’erreur de la qualification du statut du travailleur peut être très coûteuse. Donc, si l’instance détermine qu’un travailleur autonome est plutôt, dans les faits, un employé depuis la date de son embauche, vous devrez payer plusieurs montants rétroactivement : cotisations de l’employeur à la RRQ, au RQAP, à l’assurance-emploi, à la CNESST; jours fériés prévus par la Loi sur les normes du travail et les congés annuels; et vous devrez également payer les pénalités et les intérêts pour retard de paiement.
Il y aura également des conséquences pour le travailleur autonome. Par exemple, si celui déduisait certaines dépenses, il pourrait faire l’objet de redressements et ces dépenses liées à l’acquisition de matériel de bureau, d’exploitation d’un bureau à domicile et autres pourraient être réduites, voire refusées en totalité!
Inversement, un salarié qui obtiendrait plutôt le statut de travailleur autonome suivant la vérification par les différentes instances devra payer, rétroactivement, la part de l’employeur dans les différents régimes sociaux (ex. assurance-emploi et RRQ).
Conclusion
La qualification du statut du travailleur a donc des impacts financiers considérables et ce n’est pas un exercice à prendre à la légère. Pour déterminer le statut d’un travailleur, un seul critère ne suffit pas. Les critères doivent être analysés dans leur ensemble et en fonction de la situation propre des parties impliquées. En cas de doute, il est essentiel de consulter votre avocate en droit des affaires! Celle-ci pourra vous assister dans la détermination du statut du travailleur, dans la rédaction du contrat de travail ou du contrat de sous-traitance et saura répondre à vos questions!
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